Etude des perceptions et de la gouvernance sociale de la riposte à la COVID-19, Legs-Africa, 2021

Auteur : Legs-Africa

Organisation affiliée : Legs-Africa

Type de publication : Rapport

Date de publication : 2021

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Introduction

A la date du 14 juin 2021, le Sénégal enregistrait 41998 cas testés positifs à la COVID-19 dont 40536 patients guéris, 1154 décès, 545 915 personnes vaccinées et 308 patients sous traitement (https://www.covidvisualizer.com/). En mai-juin 2021, le pays connaissait une tendance baissière de cas positifs, de cas graves et de décès dans un contexte international marqué par une évolution inquiétante de la pandémie et une crise socio-économique qui prend de l’ampleur.

Pour faire face à cette crise sanitaire et socio-économique, l’Etat du Sénégal en collaboration avec les ONG, les bonnes volontés, etc. a mis en place un fonds d’une valeur de 1000 milliards de FCFA dans le cadre du Programme de résilience économique et sociale avec les partenaires techniques et financiers.

L’objectif général de cette étude est d’analyser les perceptions, représentations et attitudes par rapport à la gouvernance sociale de la COVID-19 dans les districts sanitaires de Dakar Centre, de Guédiawaye et Touba. Plus spécifiquement :

  • Analyser les perceptions, représentations et attitudes autour de la situation de la COVID-19 ; • Analyser les perceptions, représentations et attitudes autour de la prise en charge ;
  • Analyser les perceptions, représentations et attitudes autour de la réponse officielle et de sa gouvernance.

Opinions et perceptions sur la Covid-19

Les perceptions des populations sur l’existence de la Covid-19 montrent des disparités entre les jeunes, les adultes et les personnes âgées et des différences selon les districts. Dans le district de Touba, seulement 10 % chez les jeunes, 27% chez les adultes et 8,6% chez les personnes âgées affirment que l’épidémie n’est pas une affaire politique. Au niveau du district de Guédiawaye, les données montrent que beaucoup de gens (53,1%) pensent que la Covid-19 n’existe pas, dont 15,5% des jeunes, 39,9% chez les adultes et 3,7% chez les personnes âgées. Toutefois, quelques données issues des discussions montrent que les communautés associent la gestion de l’épidémie notamment la prise en charge sanitaire à une affaire politique comme le révèle les propos de cet enquêteur : « Ce qu’on entendait par rapport à la prise en charge et ce qu’on a trouvé au niveau de l’hôpital était différent. On se disait même qu’il y a une politique dans cette prise en charge ».

Opinions sur les interventions de l’Etat

L’étude a pris en compte un certain nombre de paramètres relatifs aux interventions de l’Etat. Il s’agit entre autres de documenter les questions liées au soutien de l’Etat aux communautés, les perceptions de celle-ci sur l’efficacité des mesures restrictives (déplacement interurbain, interdiction de rassemblement, etc.) et les stratégies de communication menées par les autorités dans le cadre de la mise en œuvre des stratégies de prévention des situations de vulnérabilité sanitaire et socio-économique en contexte de pandémie. Par rapport aux interventions de l’Etat, la tendance générale est favorable au soutien de l’Etat aux populations dans le cadre de la riposte contre la Covid-19. Les personnes disant avoir bénéficié d’un soutien dans la cadre de la riposte sont majoritaires dans les districts de Guédiawaye soit 69% et Dakar Centre 52%, et moins de la moitié des personnes dans le district de Touba (42%).

Par ailleurs, dans les entretiens, les personnes se plaignent de la mauvaise coordination dans la distribution des aides de l’Etat, par conséquent le sentiment général est illustré à travers cet extrait d’entretien suivant « Oui il y avait des aides mais moi je l’ai seulement entendu (…) je n’ai pas vu d’aides et les gens du quartier peuvent le confirmer. Peut-être aussi qu’il y a des gens qui en ont bénéficié ; d’autres non mais je pense bien que le nombre de personnes qui n’a pas reçu est beaucoup plus élevé. Pour ce qui est de notre quartier, s’il y a des gens qui en ont bénéficié, ce sont peu de gens donc, ou même je ne suis pas au courant de leur acquisition. ».

Perception de l’efficacité des mesures de l’Etat

Les données de l’enquête auprès des communautés montrent que la majorité des répondants dénoncent l’inefficacité des mesures de restrictions liées aux déplacements interurbains. Dans une moindre mesure, la majorité des enquêtés approuve les restrictions des déplacements interurbains dans le district de Dakar Centre. En outre, les résultats des tests montrent une relation significative entre les perceptions sur les mesures de restrictions des déplacements interurbains et le district.

Opinions sur la prise en charge  

Les questions de l’étude se sont intéressées aux perceptions des communautés sur la gestion des ressources dans le contexte de l’appui matériel et financier mobilisé par l’Etat du Sénégal pour prendre en charge les effets associés à la crise sanitaire et socio-économique. Les opinions des communautés sur la prise en charge des cas graves connaissent des positions favorables de la part des populations. Presque la moitié des personnes pensent que la prise en charge a été efficace, soit 48.9%, dont plus d’hommes, soit 28.7%, contre 20.2% chez les femmes.

A Guédiawaye plus de la moitié de la population a une opinion positive sur la prise en charge des cas graves et également avec une proportion plus ou moins similaire dans le district de Dakar Centre. Cependant au district de Touba, les données montrent une autre tendance plutôt défavorable, peu de gens, soit 11,2%, pensent que la prise en charge des cas graves a été efficace.

Selon une bajenu gox, « si on étudie un peu la situation, le Sénégal doit augmenter ses infrastructures sanitaires ainsi et mettre à jour des matériels sanitaires ». Ainsi, le fait de relever le plateau technique pourrait réduire la vulnérabilité des systèmes de santé. Mais, il en demeure néanmoins que la région de Dakar dispose d’un plateau technique de prise en charge plus relevé et une offre de soins plus satisfaisante, comparée aux autres régions, le district de Touba en particulier

L’appréciation de l’efficacité du plateau technique mis en place pour la prise en charge diffère selon les districts. On observe une proportion relativement faible concernant l’efficacité de la prise en charge dans les hôpitaux et Centres de traitement des épidémies à Touba (7%), comparée aux districts de Guédiawaye (27%) et Dakar centre (22%). Apparemment, même si des efforts sont consentis par l’État pour améliorer les soins de prise en charge à l’échelle nationale (renforcement en équipements de protection, accompagnement dans la mise en place de CTE (Centre de Traitement des Épidémies), etc. (MSAS, 2020), certains pensent que le plateau technique devrait davantage être amélioré. Selon une bajenu gox, « si on étudie un peu la situation, le Sénégal doit augmenter ses infrastructures sanitaires ainsi et mettre à jour des matériels sanitaires ». Ainsi, le fait de relever le plateau technique pourrait réduire la vulnérabilité des systèmes de santé. Mais, il en demeure néanmoins que la région de Dakar dispose d’un plateau technique de prise en charge plus relevé et une offre de soins plus satisfaisante, comparée aux autres régions, le district de Touba en particulier. Ce qui pourrait expliquer qu’on enregistre un fort taux d’adhésion à l’efficacité de la prise en charge dans les CTE pour le district de Dakar.

A cela s’ajoute le fait que ces disparités pourraient davantage favoriser les conditions de vulnérabilité du personnel de santé à l’épidémie. D’ailleurs, un agent de santé au niveau du District de Touba affirme « Dans le cadre de la riposte, je n’ai rien reçu de l’État en plus on est toujours exposé, pas suffisamment de masques et de matériels de protection » (Personnel de santé, District de Touba). A travers ce passage, il apparaît qu’il y a des insuffisances dans la riposte qui auraient contribué à exacerber la vulnérabilité du personnel de santé qui est supposé prendre en charge les cas de Covid-19.

On note qu’environ la moitié des personnes vivant avec une comorbidité n’ont pas été au courant d’un quelconque appui. Ce qui explique d’une part les problèmes de ciblage, et d’autre part le manque de rigueur dans l’atteinte des objectifs d’appui aux personnes les plus vulnérables dans le cadre de la pandémie

L’analyse met en exergue les questions de redevabilité parmi les catégories de personnes vulnérables (personnes âgées, vivant avec un handicap, etc.) susceptibles d’être affectées par la crise sanitaire. Les résultats mettent en évidence que le soutien aux personnes vivant avec une comorbidité (diabète, hypertension artérielle, etc.) a été diversement apprécié par les personnes vulnérables. Parmi les personnes vivant avec une comorbidité, 44% ignorent l’existence d’un appui destiné aux personnes avec comorbidité ; 25% pensent qu’ils en ont moyennement bénéficié. En revanche, 20% des personnes vivant avec une comorbidité affirment qu’ils n’ont pas bénéficié de l’appui de l’Etat dans le cadre de l’épidémie.

On note qu’environ la moitié des personnes vivant avec une comorbidité n’ont pas été au courant d’un quelconque appui. Ce qui explique d’une part les problèmes de ciblage, et d’autre part le manque de rigueur dans l’atteinte des objectifs d’appui aux personnes les plus vulnérables dans le cadre de la pandémie. De même les textes d’entretien montrent que la gestion des fonds ne tient pas compte des conditions de vie, réalités et préoccupations de certaines catégories vulnérables vivant avec une comorbidité. Cela se traduit à travers les propos suivants : « le médecin du district (…) m’a appelé pour me dire qu’effectivement que j’ai la Covid-19. Ensuite il m’a fait savoir que je peux rester à mon domicile et qu’ils me suivent tous les jours par téléphone (…). Je leur ai demandé est ce que je peux avoir des médicaments comme la chloroquine puisque moi je suis diabétique. Quinze jours après, je suis revenu à l’hôpital pour refaire le test. (…). Celui-ci est revenu négatif. Jusqu’à présent je n’ai reçu aucune aide ni de traitement pour lutter contre le virus. » (Récit d’un cas positif, district de Touba).

Perception du vaccin et des tests

L’analyse des données montrent que l’adhésion au vaccin est fortement associée à trois facteurs auprès des hommes et des femmes âgés. Il s’agit des mesures de prévention, des mesures de précaution, en association avec le risque de décès des suites de la Covid-19 qui encouragent dans une large mesure l’adhésion au vaccin. La perception positive que certaines cibles ont du vaccin est en corrélation avec les conséquences évitables grâce à son adoption. Les informations qui ont été collectées au niveau communautaire laissent déduire une appréciation positive du vaccin, puisqu’il contrecarre la propagation du virus, les décès y afférents, la paralysie des espaces de socialité et de travail. Les propos sont généralement tenus en ces termes : « avec le vaccin, nous, personnes du troisième âge nous nous sentons enfin protégées de la Covid-19 » (Personne âgée, DS Dakar Centre). L’implication d’experts, d’autorités sanitaires connues grâce à leur détermination et impartialité a été stratégique, puisqu’ils sont cités comme références pour convaincre et encourager la prise de vaccin. Le nom du Professeur Seydi est ressorti le plus souvent lors des discussions auprès des cibles, identifié comme ambassadeur capable de relever le défi de l’incertitude sur la qualité et l’efficacité du type de vaccin disponible au Sénégal.

Acceptabilité du vaccin et des tests

Les résultats des données qualitatives montrent que le vaccin est reconnu par les populations comme un moyen de réduire la propagation du virus. Toutefois, des réticences sont notées au niveau des communautés. L’analyse révèle que les communautés ont une réticence face au vaccin et se montrent catégoriques sur leur position. En effet, ils assument leur position d’anti vaccin qu’ils justifient par les complications souvent notées suite à la prise du vaccin. D’autres développent des idées sur le bien-fondé de l’efficacité des doses du type de vaccin qui a été mis à disposition au Sénégal. S’y greffe une certaine méfiance à l’égard des élites politiques nationales que certains individus considèrent comme de véritables manipulateurs, leurs actions à l’endroit des populations étant souvent perçues comme attitude trompeuse. Cette idée commune est appréhendée comme un sérieux motif de réticence vis-à-vis du vaccin.

On note, à travers les résultats de l’analyse des données du questionnaire, que 31% de la population accepterait de se faire vacciner. Dans cette proportion, on note des différences significatives entre districts. En effet, on enregistre à Touba le plus faible pourcentage d’acceptation (5%), et les districts de Guédiawaye et Dakar Centre ont les mêmes tendances (13%). Ainsi, on peut dire que l’environnement social est un facteur qui pourrait influencer la prise de décision ou le fait d’accepter de se faire vacciner.

Les données de l’étude révèlent que 59% des personnes avec une proportion plus élevée à Touba est satisfaite des informations reçues sur les effets secondaires du vaccin, 28% en sont moins satisfaits, 20% ne sont pas satisfaits. Néanmoins, même si on observe une appréciation relativement positive (33% : pourcentage le plus élevé) sur les informations autour des effets secondaires du vaccin dans les trois districts, des efforts pourraient davantage être consentis dans la stratégie de communication afin de faciliter une meilleure acceptation du vaccin, comme le montre les données de Dakar où 34% sont hésitants. Dans ce sens, un interlocuteur indique ceci : « le vaccin, j’en ai peu d’idées parce qu’on nous a dit c’est venu mais du côté de l’Europe on a repoussé les campagnes de vaccination car ils parlent d’effets secondaires et de non efficacité des vaccins. » Par conséquent, les informations jugées douteuses autour de l’efficacité ou non du vaccin atteste du manque de confiance des communautés vis-à-vis des autorités sanitaires et étatiques qui pourrait constituer un facteur de réticence en ce qui concerne la prise des doses recommandées pour la prévention de la pandémie.

Gouvernance et redevabilité

Il y’a des différences observées entre hommes et femmes en ce qui concerne le soutien apporté aux populations dans les districts. Pour Touba, 65,8% des hommes et 34, 9% des femmes ont bénéficié du soutien, 41,4% des hommes et 58,5% des femmes ont perçu à Guédiawaye et pour le district de Dakar Centre, 59, 2% des hommes ont bénéficié d’un appui contre 41,7% pour les femmes. On a comme l’impression que les hommes ont plus bénéficié du soutien que les femmes dans le cadre de la riposte à Touba et à Dakar Centre. L’interprétation des données sur l’égalité et l’équité d’accès à l’appui et au soutien soulèvent les questions liées au genre qui semblent très importantes à prendre en compte dans les analyses liées à l’épidémie Covid-19 au Sénégal.

On constate en ce sens un faible niveau d’implication des communautés en ce qui concerne l’identification des familles qui sont dans le besoin. Cette situation révèle en outre une faible dynamique de co-construction entre les autorités en charge de la mise en œuvre du plan de riposte et les populations. Ce qui peut influencer les perceptions des communautés sur les actions de l’État associées à la redevabilité (distribution des vivres, équipements de protection, etc.). C’est-à-dire que le manque, voire l’absence de co-construction à travers des concertations à l’échelle communautaire peut entraîner un sentiment d’exclusion de certaines catégories comme le montrent les propos de cet interlocuteur. « Les autorités ne nous ont rien donné (…) il n’y a pas une sensibilisation digne de son nom dans ce quartier. » Ainsi, ces propos traduisent une insatisfaction des actions menées par l’État liée à une faible inclusion des populations dans les stratégies de riposte.

L’insuffisance des actions de l’État a par ailleurs suscité l’engagement communautaire de certains acteurs. En effet, ceux-là ont contribué à la gestion de la pandémie à travers la mobilisation de fonds, des distributions de dons (masques, gels, etc.). Ainsi, selon une informatrice « outre les denrées alimentaires que le gouvernement avait distribuées, ce sont les «bajénou gox »  de Touba qui se sont mobilisés et nous avons cotisé chacune 10.000 FCFA ». C’est avec cet argent qu’on a acheté de l’eau de javel, des gels, cotol et autres pour les distribuer au niveau des daaras. C’est vrai que le Maire a aussi donné des aides, mais je peux dire que ce n’est pas assez.». Ces actions montrent que la lutte contre l’épidémie devrait davantage s’inspirer de la mobilisation et du modèle de solidarité sociale exprimée par certains acteurs pour faire face à l’épidémie. En plus de cela, une communication axée sur la gestion des fonds et le suivi des activités a été une forme de redevabilité revendiquée mais constitue l’une des préoccupations des communautés en contexte d’épidémie.

On constate en ce sens un faible niveau d’implication des communautés en ce qui concerne l’identification des familles qui sont dans le besoin. Cette situation révèle en outre une faible dynamique de co-construction entre les autorités en charge de la mise en œuvre du plan de riposte et les populations. Ce qui peut influencer les perceptions des communautés sur les actions de l’État associées à la redevabilité (distribution des vivres, équipements de protection, etc.)

La redevabilité constitue une demande sociale : « l’Etat doit prendre ses responsabilités et faire un suivi de la gestion des fonds pour rendre compte à la population. Nous tous on a entendu parler de mille milliards mais dommage qu’on n’arrive toujours pas à voir où est passé cet argent. C’est extrêmement difficile et actuellement les gens souffrent.» Les populations dénoncent des problèmes d’équité dans la distribution des fonds COVID : « Il ne voulait pas que je sache ce qu’ils font. J’ai constaté que mon délégué de quartier a donné les vivres qu’à ses proches et parents. Donc je n’ai pas pu continuer la distribution et je recommande à l’Etat un audit profond pour éclairer la population sur comment ils ont utilisé l’argent du contribuable ».

Par ailleurs, il apparaît que la gestion des fonds pourrait être considérée comme un vecteur de reproduction voire de renforcement des inégalités sociales dont sont victimes les catégories vulnérables, à savoir les personnes à mobilité réduite (personnes âgées, vivant avec un handicap), les familles pauvres, les personnes vivant avec une comorbidité, mais surtout ceux qui s’activent dans le secteur informel. Pour certains, « il y a aussi des gens qui n’ont pas senti la dureté de la situation lors de la première vague, il y en a aussi qui l’ont sentie. Mais c’est beaucoup plus nombreux du côté de ceux qui ont beaucoup souffert. Notamment les chauffeurs, les charretiers, les tailleurs, les gens qui ont leurs places… Les travailleurs les moins touchés sont ceux qui s’activent dans la fonction publique, là c’est un peu différent  ».

Il ressort de ce passage que les catégories sociales qui s’activent dans le secteur informel semblent être plus affectées et plus vulnérables. Ce qui renforce les dynamiques d’inégalités sociales surtout en contexte d’épidémie. Les perceptions sur l’accès et l’équité des populations sur les bénéficiaires de l’appui s’orientent vers certains acteurs. Selon les données, 45% de la population ne savent pas si les autorités administratives et politiques ont bénéficié des programmes d’appui et 28 % pour l’ensemble des districts concernés pensent que cette catégorie a beaucoup bénéficié du programme d’appui. Certains associent cette situation à un manque d’équité dans la distribution des fonds COVID. Selon un informateur « la gestion sur la distribution de vivre n’était pas équitable. Parce que si certains ont reçu par contre d’autres n’ont pas reçu leurs parts (…). Donc on devrait le faire avec équité et équilibre. En plus il y avait des personnes qui en ont plus besoin surtout » Par conséquent, les actions associées à la redevabilité sont accompagnées de dynamiques d’exclusion sociale.

La redevabilité constitue une demande sociale : « l’Etat doit prendre ses responsabilités et faire un suivi de la gestion des fonds pour rendre compte à la population. Nous tous on a entendu parler de mille milliards mais dommage qu’on n’arrive toujours pas à voir où est passé cet argent. C’est extrêmement difficile et actuellement les gens souffrent

Moins du tiers de la population enquêtée au niveau des trois districts pensent que le couvre-feu est efficace et plus des deux tiers pensent que la mesure n’est pas efficace. Les données montrent qu’une grande part des personnes pense que le couvre-feu n’est pas efficace et donc, remet en question la pertinence de cette mesure compte tenu de leur condition de vie. En fait, cela se perçoit dans un contexte de vulnérabilité socio-économique entraînée par la crise sanitaire. L’inadaptabilité de cette mesure aux préoccupations socio-économiques des populations, est la tendance dominante dans les opinions. Ainsi, selon une interlocutrice : « je suis restauratrice, je gère ma propre cantine, mais l’interdiction de circuler au-delà de 20 heures a eu des conséquences nettement alarmantes sur mes économies ». Ainsi, le couvre-feu instauré pour endiguer la propagation de l’épidémie constitue ici un facteur de vulnérabilité à la pandémie.

Par ailleurs, cette situation provoque un sentiment de frustration chez les populations dont les activités sont restreintes.

Conclusion

Les résultats mettent en évidence des opinions contrastées au sujet du bénéfice de la réponse par les populations vulnérables. L’identification des besoins et les processus de mise en œuvre ne semblent guère avoir été appropriés par les communautés de base. Un climat de suspicion apparaît à l’analyse des réponses, lesquelles suggèrent les motivations politiques. L’engagement communautaire apparaît comme pouvant être une trame à partir de laquelle, les questions de redevabilité active de la gouvernance sanitaire, économique et sociale de la COVID-19, pourraient être repensées et mises en œuvre dans le cadre de processus participatifs.

Recommandations

  • Co-construire des stratégies et plans d’actions pour la reddition des comptes auprès des communautés ; de manière inclusive et indépendante des considérations politiques ;
  • Co-construire de manière participative, des cartographies de la vulnérabilité, des initiatives locales et des actions de solidarité autour des impacts, des mesures et réponses de l’Etat et de ses partenaires ;
  • Co-construire des stratégies inclusives pour un accès rapide des catégories les plus vulnérables aux ressources mobilisées et à leur gestion ;
  • Co-construire une plateforme permanente de redevabilité active qui implique toutes les parties prenantes au niveau communautaire et engage les décideurs dans le suivi des propositions citoyennes.