« Nous avons un centre de santé déséquilibré et la plupart des malades sont évacués à Tambacounda, à 200 km de Kidira » Demba Thiam, Maire de Kidira

Demba Thiam

Demba Thiam est le maire de Kidira, une localité frontalière du Sénégal oriental. Elle représente le principal point de passage vers le Mali.

Écouter le podcast ci-dessous

Pourriez-vous nous faire un état des lieux des infrastructures sanitaires à Kidira ? 

Lorsque j’ai été élu, il n’y avait qu’un dispensaire au niveau de Kidira. Il était donc prévu de faire un centre de santé. Celui-ci a été construit mais il y avait des difficultés pour que les gens s’y rendent. Donc nous avons fait une priorité de déplacer ces gens et de les installer au niveau du centre sanitaire. Cela a été fait au courant de 2015. Il fallait aussi régler l’électricité, l’eau et les petits détails. Tout cela a été fait. En résumé, en matière sanitaire, toute la commune n’a que le centre de santé. Ce centre de santé est aussi celui qui prend en charge toutes les autres communes qui gravitent autour de Kidira.

Avec des infrastructures sanitaires aussi peu équipées, comment sont traitées les personnes atteintes de maladies graves ?

Nous sommes un district qui dépend aussi de Tambacounda qui se trouve à deux cents kilomètres de Kidira. Nous avons un centre de santé plutôt déséquilibré. La grande partie des malades sont évacués sur Tambacounda. Le problème fondamental est d’abord le manque d’outils pour la prise en soins des patients. L’autre problème, ce sont les évacuations parce que la distance est longue et le trajet est mauvais.

Quel est l’état de vaccination et de protection des enfants ? 

L’état de vaccination est très bon à Kidira et au Sénégal. Grâce à l’expérience que nous avons en PEV, la couverture vaccinale que nous avons est vraiment satisfaisante.

Dans quelle mesure la couverture maladie universelle mise en œuvre par l’Etat est-elle appliquée dans votre commune ?

C’est nous d’ailleurs qui logeons ce projet, dans l’enceinte de l’hôtel de ville. Dire à quelqu’un de cotiser même quand il n’est pas malade, c’est pour nous Sénégalais – et surtout de la zone éloignée – difficile à comprendre. Maintenant avec la sensibilisation, les gens sont en train de prendre conscience que c’est comme une banque.

Dire à quelqu’un de cotiser même quand il n’est pas malade, c’est pour nous Sénégalais – et surtout de la zone éloignée – difficile à comprendre

Selon vous, quelles sont les solutions à exploiter pour améliorer la santé et le bien-être des populations à Kidira ?

Nous avons un programme sanitaire, comme je l’ai dit précédemment. Puisque nous avons des quartiers excentrés, nous nous sommes dit : pour désengorger le centre de santé, nous allons créer des cases de santé dans les quartiers éloignés, à Sinthiou Dioye et Diboli. Cela nous permettra de désengorger le centre de santé. Cela est dans le programme communal.

La médecine traditionnelle est un phénomène assez répandu au Sénégal. Est-ce que vous croyez qu’elle contribue à alléger les souffrances des populations à Kidira ?

Chez nous, il y a une médecine qui est bien organisée (formelle), mais il y a des fétiches. Chacun se lève et dit “nous sommes Africains”. C’est ainsi que partout des gens vendent des médicaments “traditionnels”. Si quelqu’un est là et dit qu’il peut soigner les maux de tête et les maux de ventre et que cela continue de marcher, c’est que les gens y trouvent leur compte. Il faudra que le gouvernement du Sénégal voie comment encadrer cela.

Si cette médecine est utilisée, faut-il alors l’intégrer dans le système de santé publique vis-à-vis de son importance dans la vie des populations ?

Si les populations le veulent, il faut l’intégrer, c’est une obligation. Les gens ont besoin d’une bonne santé, mais la couverture au niveau national est incomplète. Malgré tout, les gens guérissent à travers cette médecine ! Même si on voulait l’éliminer aujourd’hui, les gens vont râler, c’est une obligation pour l’Etat du Sénégal d’encadrer.

La santé est un secteur transféré à la collectivité territoriale. Quels sont les moyens dont dispose la commune pour investir dans ce domaine ?

Au-delà des fonds que le gouvernement du Sénégal alloue à la commune, au niveau de la direction de la collectivité, il y a un montant pour l’hôpital. Chaque année, nous faisons une dotation en médicaments, c’est une obligation. La commune s’est engagée à payer pour un nouveau médecin, deux infirmières et deux sages-femmes pendant au moins six mois.

Même si on voulait l’éliminer aujourd’hui, les gens vont râler, c’est une obligation pour l’Etat du Sénégal d’encadrer

Le gouvernement du Sénégal a construit le centre de santé, mais ils l’ont ni équipé en électricité ni en eau ! C’est la commune qui s’est investie et qui l’a fait. C’est donc sur le dos de la commune que nous avons eu à faire ces choses. Ce sont des choses qui sont maintenant sous notre responsabilité.

Nous discutons beaucoup avec le médecin-chef. Nous avons de gros projets, comme, essayer de loger le docteur, ses deux adjoints et ses infirmiers autour ou dans l’enceinte du centre de santé. Cela va leur donner des facilités, puisque le centre de santé est dans la brousse, donc si à chaque fois il faut appeler le docteur et il fait presque deux kilomètres pour venir, ce n’est pas idéal.


Crédit photo: WATHI

Commenter