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Extraits
Bakel est un département avec une position géographique stratégique, qui lui confère un rôle de plateforme ouverte sur le Mali, la Mauritanie, mais aussi dans une certaine mesure la Guinée-Bissau et la République de Guinée. Selon vous, M. Diallo, est-ce que ce potentiel est suffisamment exploité ?
La commune de Bakel a une situation géographique stratégique. Le commerce transfrontalier est dense mais il est sous-exploité. Il y a un grand commerce qui se fait entre le Mali et le Sénégal et Bakel en est la porte d’entrée. Quand vous allez à la frontière du côté de Kidira, vous trouverez des marchandises mais également des mouvements de population entre les frontières. Du côté de la Mauritanie, c’est encore sous-exploité car il y a le fleuve. Si on mettait un pont qui relierait le village de Bakel avec le village en face en Mauritanie, cela impacterait grandement les deux côtés, et toute la sous-région. Il y a un mouvement de population de part et d’autre mais tout se fait sur des pirogues : les marchandises, les populations… Cela réduit l’intensité des échanges.
Quel est l’état d’avancement du programme de rénovation du chemin de fer allant au Mali ?
Par le passé, le chemin de fer a constitué un élément essentiel dans notre vie quotidienne. Maintenant, nous utilisons tellement les routes que leur durée de vie se dégrade rapidement. Le chemin de fer va améliorer la mobilité des gens mais également va impacter le secteur commercial et touristique, puisque nous sommes une zone à potentiel touristique.
Pensez-vous que les jeunes sont assez formés pour exploiter le potentiel de l’agriculture et du tourisme dans la région ?
Nous sommes une zone à vocation touristique et je pense que les jeunes, si les infrastructures sont là, pourront se lancer dans ce créneau. Nous avons également du potentiel pour l’agriculture avec notre environnement. Il faudrait rendre plus facile l’exploitation et le transport des ressources naturelles. Les jeunes comme les femmes ont les capacités de mener ces activités économiques. Il suffit tout simplement d’un renforcement de capacités. Il manque aussi des financements pour pouvoir exploiter le potentiel au maximum.
Selon vous, quelles sont les infrastructures dont la région a le plus besoin ?
D’abord les infrastructures routières. C’est fondamental. C’est la base d’un développement. Nous avons aussi besoin de plateformes d’unités de transformation car nous sommes une région à vocation agricole et nous souhaitons donner une valeur ajoutée aux exploitations des producteurs. Nous avons aussi besoin d’infrastructures sanitaires qui nous éviteraient d’évacuer nos malades vers d’autres centres de référence. Nous avons besoin d’un hôpital avec toutes les spécialités. Il y en a à Tambacounda mais nous en avons besoin dans le département de Bakel (plus de 200km entre Bakel et Tamba*).
Le chemin de fer va améliorer la mobilité des gens mais également va impacter le secteur commercial et touristique, puisque nous sommes une zone à potentiel touristique
À Bakel, les populations reposent sur les collectivités locales pour développer leurs communautés. Pensez-vous que les collectivités locales ont assez de moyens pour prendre en charge les préoccupations de ces populations ?
Comme on dit, il n’y a jamais assez. Pour les collectivités locales, les ressources sont insuffisantes. Les missions sont bien définies, l’ambition et la vision sont là, mais les moyens manquent. Il y a eu de gros efforts de la part de l’État en 1996 lorsque l’on a mis en place la régionalisation. Avec l’acte III de la décentralisation initié par le Président de la République actuel, il y a eu une véritable révolution, avec des programmes et des projets et beaucoup d’investissements dans les collectivités territoriales : le PUDC, le PUMA, Promovilles, etc. Mais ça, c’est au niveau national. Du côté des communes, il nous manque encore des moyens pour pouvoir mettre en œuvre certaines de nos compétences liées à l’éducation, à la santé, à l’environnement. Il faut que les collectivités territoriales aient une intelligence commune dans le cadre de l’inter-communalité pour pouvoir mutualiser les moyens. Avec la coopération décentralisée, on pourrait arriver à faire quelque chose de substantiel au profit de nos populations.
Alors, comment faire pour aider les collectivités locales, malgré le fait qu’elles n’aient pas assez de moyens ?
Les textes de loi, il faut les valoriser. Vous avez la possibilité de vous mettre en inter-communalité. Il faut valoriser cela. Vous avez également la possibilité d’entrer en coopération avec d’autres collectivités dans la sous-région ou au niveau international. C’est une disposition de la loi qui vous permet de valoriser cela.
Nous avons aussi besoin de plateformes d’unités de transformation car nous sommes une région à vocation agricole et nous souhaitons donner une valeur ajoutée aux exploitations des producteurs
L’État est également en train de réfléchir pour que les fonds d’investissement qui sont concentrés au niveau national comme le budget consolidé d’investissement (BCI) soient transférés directement à la base. Le président de la République a demandé à ce que le ministre des finances essaie de réfléchir avec le ministre chargé des collectivités territoriales dans ce sens. Par exemple, si en tant que président du conseil départemental, j’ai compétence pour construire des salles de classe, il n’y a pas besoin d’avoir un programme de construction scolaire logé au ministère. Pourquoi ne pas décentraliser ces moyens-là directement au niveau de ces collectivités territoriales ?
Crédit photo: WATHI
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