« Ce qui se passe à Thiès actuellement, c’est du banditisme foncier » Omar Badiane, Conseiller municipal à Thiès Nord

Omar Badiane

Omar Badiane est un conseiller municipal à Thiès Nord, l’une des trois communes d’arrondissement de la ville de Thiès.

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Vous avez expliqué un des problèmes du foncier à Thiès qui est le problème de la délimitation entre la commune de Thiès et la commune de Fandène. Pourriez-vous nous expliquer l’étendue des autres problèmes liés à la spéculation foncière ?

Ce qui se passe à Thiès c’est du banditisme foncier. Sur les 552 communes que compte le Sénégal, il n’y a que ces trois communes qui n’ont pas le pouvoir de fait. Actuellement, il y a une commission de distribution des parcelles présidée par la Ville de Thiès (qui coiffe les trois communes) alors que la Ville n’a pas de territoire. La Ville est la mutualisation des trois communes.

Comment une Ville qui n’a pas de territoires peut présider des commissions pour affecter des terres ? Cela devrait relever des communes.

Ce qui se passe actuellement avec la désaffectation des terrains pose problème.

Vous dîtes qu’il faut une réforme sur les titres de propriété à Thiès. Pourquoi ?

Lorsque nous étions à la mairie en 2014, nous nous sommes dit que comme les domaines sont une compétence transférée, pourquoi le rapporteur de cette commission, qui est en même temps le receveur des domaines, ne pourrait-il pas édifier ce type de documents. C’est nous qui avions fait la proposition.

Quand ce rapporteur délivrait les titres de propriété, nous avions un procès-verbal et il y avait beaucoup de transparence. Mais actuellement, il n’y a pas de permis pour les lotissements et les affectations que l’on voit.

Il y a eu une entreprise qui voulait construire un centre de visite technique pour les véhicules. Le receveur leur a délivré un titre de propriété et ils ont commencé à construire. Quand les populations se sont interrogées, ils ont constaté que personne n’était au courant de cela sauf le maire. Les populations n’étaient pas au courant. Même l’autorité administrative n’était pas au courant. C’est pour cela que je propose que les titres de propriété soient signés par le président et le secrétaire de commission. Même l’autorité administrative devrait signer parce qu’il doit y avoir un contrôle de légalité par le préfet.

Au niveau de Thiès, il y a des quartiers où ils n’ont pas de titres de propriété.

Pourquoi ce problème persiste alors que vous estimez que les problèmes fonciers avaient été résolus en 2004 ?

Quand je dis que ce problème était résolu, c’est concernant les gens qui avaient des conflits de parcelles bien identifiés. Par exemple, on vendait une parcelle à plusieurs personnes, cela créait des conflits. Nous avions appelé tout le monde et nous avions fait des lotissements pour que tout le monde puisse en avoir. Ce qui fait qu’il n’y avait plus de problème par rapport à ça.

Maintenant pour les questions de sécurité foncière et de titres de propriété, c’est un autre problème.

Quels sont les risques si cette situation perdure ?

Nous avions proposé de régler ce problème et nous avions même mis en place une commission pour la régularisation des parcelles. J’avais été reçu par le maire au début puis plus rien. Pourtant c’est un problème dont la résolution peut apporter à la mairie de l’argent grâce aux frais de bornage. Je ne peux pas comprendre qu’on vous affecte un terrain, vous le vendez à 20 millions et la mairie n’en a absolument rien. Avec les frais de bornage, la mairie pourrait avoir des revenus.

Vous êtes né et vous avez grandi à Thiès, vous avez fait votre carrière professionnelle à Thiès-Nord. Selon vous, quels sont les avantages comparatifs de Thiès-Nord pour se développer ?

L’avantage de Thiès-Nord est qu’elle est une commune sans infrastructures. Il n’y a absolument rien. C’est un avantage car il y a là l’opportunité de réaliser ces infrastructures. C’est possible de le faire.

Thiès-Nord a un problème d’aménagement. La résolution de ce problème peut aider la commune à se développer et aider les populations à se sentir concernés.

Il y avait un cadre de concertation des maires de Thiès. Est-ce que ce cadre de concertation existe toujours ? Est-ce qu’il y a une collaboration entre les différentes communes ?

Non, il n’existe pas. J’avais créé ce cadre à une époque et il nous permettait de régler tous les problèmes. Même les Ong étaient impliqués dans ce cadre. J’avais demandé aux Ong qui travaillaient dans notre commune de mutualiser nos efforts pour que les gens ne travaillent pas sur des doublons.

Comment voyez-vous le futur de Thiès-Nord ?

Thiès-Nord fait plus de 120.000 habitants. Nous n’avons pas de stade praticable alors que beaucoup de sportifs habitent à Thiès-Nord. Quand ils jouent, ils doivent aller à Thiès-sud ou à Thiès-ouest.

Je lance un appel aux acteurs de développement. Le développement ce n’est pas seulement la commune. Le développement c’est tout le monde. Chacun peut y contribuer. Il faut impliquer davantage la population.

Il faut aussi demander aux maires de choisir des priorités. Les maires veulent faire du touche à tout partout et rien ne se réalise. Quand on a des moyens limités, il faut voir les priorités, les régler d’abord et ensuite voir autre chose.


 

Crédit photo: WATHI

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