Auteur : Groupe de la banque africaine de développement
Site de publication : GBAD
Type de publication : Rapport
Date de publication : Septembre 23
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Introduction
Très vulnérable aux changements climatiques, le Sénégal subit des impacts économiques majeurs. Situé dans la ceinture sahélienne et bordé par un littoral de 700 km, le Sénégal subit de plein fouet les effets des changements climatiques : hausse des températures, variation des précipitations et élévation du niveau de la mer. Cette situation affecte lourdement l’économie sénégalaise et pourrait ralentir considérablement la marche du pays vers l’émergence.
Le présent rapport thématique pour le Sénégal examine le rôle du secteur privé dans le financement de l’action climatique et de la croissance verte. Il explore en outre les possibilités d’exploiter le capital naturel pour financer l’adaptation aux changements climatiques et l’atténuation de ses effets et pour promouvoir la croissance verte. Il vise à reproduire, au niveau des pays, les analyses effectuées au niveau continental dans le principal rapport de la Banque africaine de développement sur les perspectives économiques en Afrique (PEA).
Développements macroéconomiques et financiers récents
Croissance économique et moteurs : Au Sénégal, la croissance économique a ralenti en 2022 à 4,0% contre 6,5% en 2021 en raison notamment des conséquences de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, combinée aux sanctions de la CEDEAO contre le Mali, principal client des exportations sénégalaises.
Cette décélération a ainsi été accentuée par un ralentissement considérable du secteur secondaire (de 7,8% en 2021 à 1,1% en 2022), en raison de la perturbation des chaînes d’approvisionnement, de la flambée des prix des matières premières, et de la contraction du secteur primaire (-1,4%) causée par une campagne agricole moins favorable due à la hausse des coûts des intrants et à des performances médiocres dans la production d’arachides et de coton. Au niveau de la demande, la décélération de la croissance s’explique par un ralentissement considérable du taux de croissance de l’investissement privé, qui est passé de 19,7% en 2021 à 3,0% en 2022, à la suite des incertitudes du contexte économique de 2022.
L’impératif de la croissance verte et le rôle du financement du secteur privé au Sénégal
La croissance verte et l’action climatique sont importantes pour l’ambition du Sénégal d’accéder à l’émergence en 2035. Le Sénégal subit énormément les effets des changements climatiques, en raison de la hausse des températures, des variations des précipitations et de la montée du niveau de la mer. Malgré une faible contribution de 0,02% du total des émissions mondiales historiques, le Sénégal est touché de manière disproportionnée par des risques extrêmes tels que les inondations et les sécheresses.
Le Sénégal ambitionne de promouvoir la croissance verte et résiliente aux changements climatiques, à travers une mobilisation accrue du potentiel d’investissements verts. Par conséquent, les besoins annuels de financements climatiques (1,3 milliard USD) sont bien identifiés à moyen et long terme. Cependant, malgré des hausses observées ces dernières années, les flux de financements sont faibles, laissant apparaître des gaps importants.
La finance climatique était davantage orientée vers les projets d’adaptation, mais cette tendance s’est inversée à partir de 2017. De 2010 à 2016, les projets d’adaptation aux changements climatiques représentaient en moyenne presque 60% du financement climatique. Il s’agissait essentiellement de projets adressant la montée du niveau de la mer à travers des digues de protection, la résilience du secteur agricole avec, entre autres, des ouvrages de lutte contre la salinisation des terres, les aménagements de bas-fonds et bassins versants, des digues anti-sel ainsi que des réserves naturelles communautaires.
Besoins futurs de financement du secteur privé
Selon la Contribution déterminée au niveau national du Sénégal (2020), les besoins de financement cumulés du Sénégal pour répondre de manière adéquate aux changements climatiques sont estimés à 13 milliards de dollars, sur la période 2020- 2030. En moyenne annuelle, ces besoins sont estimés à environ 1,3 milliard de dollars (6,1% du PIB).
Ce montant ne couvre pas les aspects liés au renforcement de capacités au niveau local estimés à 0,1 milliard de dollars durant la période 2020-2030. Les orientations de la CDN, sont bien alignées avec les politiques publiques du Sénégal, notamment les PAPPSE. En effet, la mise en œuvre des projets «climat» du PAP PSE 2 permettra au Sénégal de respecter ses engagements contenus dans la CDN.
La croissance verte et l’action climatique sont importantes pour l’ambition du Sénégal d’accéder à l’émergence en 2035. Le Sénégal subit énormément les effets des changements climatiques, en raison de la hausse des températures, des variations des précipitations et de la montée du niveau de la mer. Malgré une faible contribution de 0,02% du total des émissions mondiales historiques, le Sénégal est touché de manière disproportionnée par des risques extrêmes tels que les inondations et les sécheresses
Compte tenu des tendances récentes des flux mondiaux de financement climatique privé vers le Sénégal, le secteur privé est susceptible de contribuer de 25 % à 75 % des besoins. Pour une contribution de 25% aux besoins de financement climatique, ce qui représente un scénario prudent, le secteur privé devrait augmenter sa contribution financière de 11% par an. Pour une contribution de 50 % au financement climatique par le secteur privé, qui est un scénario modéré, la contribution du secteur privé devrait augmenter de 18% par an. Une contribution de 75 % au déficit de financement climatique, qui est un scénario ambitieux, verrait le financement du secteur privé croître de 23% par an.
Obstacles aux investissements du secteur privé pour la finance climatique
Forte accumulation de la dette publique
L’augmentation de la dette publique réduit la capacité du pays à développer des instruments innovants pour le financement de la croissance verte et de l’action climatique, et limite le volume des investissements qui peuvent être orientés vers le développement de l’infrastructure de base et des cadres d’investissement propices pour la contribution du secteur privé.
Cette situation pourrait à terme affecter les investissements privés au Sénégal si des mesures idoines ne sont pas prises. En effet, la stabilité macroéconomique est un des prérequis majeurs pour attirer des investissements privés. Par conséquent, dans un secteur assez nouveau pour les opérateurs économiques comme la croissance verte, les autorités doivent redoubler d’efforts pour amoindrir les risques.
En outre, à travers l’effet d’éviction, l’augmentation de la dette intérieure réduit considérablement l’épargne disponible que peut mobiliser le secteur privé pour financer les projets d’adaptation et d’atténuation aux changements climatiques. Enfin, il faut noter le manque de directives au sein de l’UEMOA sur la finance verte et les obligations vertes, l’absence de réglementation et de politique contraignant les Banques commerciales et les grandes industries énergivores et à forte intensité de carbone à disposer d’une politique de responsabilité climatique et de transition verte.
L’évolution du capital naturel
Le capital naturel est réparti en trois groupes : a) le capital renouvelable, qui comprend le bois forestier, le bois non ligneux forestier, les mangroves, les pêcheries, les zones protégées, les terres cultivées et les pâturages ; b) le capital non renouvelable, comprenant le pétrole, le gaz naturel, le charbon et les minéraux et ; c) les formes non mesurées de richesse naturelle, telles que le potentiel d’énergie renouvelable provenant des ressources solaires, éoliennes et hydroélectriques, des paysages et des actifs marins.
Dans le cas du Sénégal, la superficie des terres agricoles (champs et pâturages) est restée quasiment stable de 88150 km2 en 1995 à 88 780 en 2018, soit une augmentation de moins de 1% sur la période. Dans le même temps, sur la base des comptes du patrimoine présentés ci-dessus et avec le fait que la superficie des terres agricoles soit restée quasiment stable, la valeur des terres par hectare aurait connu sur la période une augmentation de presque 50% au Sénégal, passant de 932 USD à 1353 USD. Malgré cette hausse très importante, ces chiffres semblent curieusement faibles par rapport à certains pays africains comme le Kenya où la valeur du capital naturel sous forme de terres agricoles et de pâturages est estimée à 4169 USD par ha.
Ressources renouvelables
Avec la découverte du pétrole, le Sénégal a une opportunité majeure d’augmenter considérablement son niveau de capital naturel non renouvelable. Ces dernières années le Sénégal a entrepris de nombreuses explorations pétrolières qui ont révélé l’existence de gisements de pétrole et de gaz commercialement exploitables avec démarrage de la production prévu à l’horizon 2022. Les réserves gazières et pétrolières sont estimées respectivement à 560 milliards de m3 et 650 millions de barils.
Le Sénégal veille à recevoir une part équitable et juste de cette rente provenant du gaz et du pétrole, mais les recettes attendues seront modestes tandis que des défis importants peuvent émerger. Comme la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest engagés dans des opérations pétrolières, le Sénégal pratique des contrats de partage de production (PSC) et exige des primes de signature et de production. En préparation de la nouvelle ère pétrolière, un nouveau code pétrolier est entré en vigueur en janvier 2019.
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